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EDITO: Une voie olympique pour le ski alpinisme?

[EDITO] « Un grand jour ». C’est ainsi que l’ISMF a qualifié le vendredi 10 janvier, jour de l’entrée du ski-alpinisme dans la famille olympique. Six jeunes, Suisses, Suissesses, Autrichien et Française montaient sur les premiers podiums aux cinq anneaux au terme de l’épreuve individuelle des Jeux olympiques de la Jeunesse, Lausanne 2020. La voie olympique est-elle bien ouverte ? Pour les aînés ce ne sera pas Pékin 2022 mais, on peut le penser, Milan 2026. Nombreuses sont pourtant les questions encore ouvertes.

La première est de savoir si le format du ski-alpinisme se prête aux Jeux olympiques. Villars – comme les compétitions de l’ISMF - nourrit quelques doutes. Le calendrier mondial est fait, aujourd’hui, de trois courses qui relèvent du spectacle pur, pour ne pas dire du cirque : le sprint, le relais et la vertical race. Tout se déroule sur pistes, en milieu totalement aseptisé. Avantages évidents pour les spectateurs et les médias, télévision surtout. La quatrième course est l’individuelle qui se dispute normalement en terrain de montagne. Or le Villars olympique – un peu à cause du faible enneigement c’est vrai – en a fait une compétition à 80 % sur pistes. Techniquement un joli parcours, mais la montagne n’était plus que décor.

Autre constat, le parcours de l’individuelle et les stades (c’est le mot) de sprint et de relais étaient entièrement enfermés derrière un rideau de filets et de rubalises. Un peu pour la sécurité des coureurs et l’équité de la compétition, soit. Mais enfermer la course dans une cage est totalement contraire à l’esprit même du ski-alpinisme. Le classement de la Pierra Menta a-t-il jamais été faussé par les haies des 3-4000 spectateurs montés au Grand Mont ? Ou celui de la PdG par la foule de la Rosablanche?.... Je ne suis pas naïf. Il y a de l’argent à protéger. Celui des droits à l’image par exemple. 

La deuxième question est aussi celle que posent les actuelles dissensions entre la Fédération internationale et la Grande Course. Une saison de quatre mois, quelques dizaines de skieuses et skieurs à haut niveau, une grosse poignée d’organisateurs plus passionnés que riches… et on arrive à ne pas être d’accord. Grave ! Et à régler au plus vite pour un ski-alpinisme uni.

J’ajoute que d’autres formats de courses se sont développés au niveau international sur des bases plus commerciales. Le plus souvent, leur terrain est celui des pistes, en nocturne notamment. Pensons à la Mountain’Attack ou la Sellaronda. Extraordinaires sur le plan des performances mais à des années lumière du ski-alpinisme et de ses épreuves reines : PdG et courses de la Coupe suisse CAS, Rutor, Pierra Menta, Mezzalama, Adamello…

Reste enfin que le ski-alpinisme est un sport pauvre où peu d’argent circule. Est-ce que cela peut intéresser la famille olympique ? Il y a longtemps qu’elle ne se nourrit plus d’idéal.

Bref, le ski-alpinisme peut rêver de Jeux olympiques et Lausanne 2020 a conforté ce rêve. Mais il doit alors accepter de changer. Il se déroulera sur des pentes par la force des choses mais pas dans un environnement de montagne. Le spectacle et son business ne le permettront pas. Ou alors l’Italie, dont on sait la passion pour la montagne, saura se montrer suffisamment convaincante pour faire plier le CIO. In bocca al lupo !

 

Claude Défago